A l'intérieur de la course

ParFred

A l'intérieur de la course

Préambule : Ce petit récit vous raconte l’histoire presque fictive de triathlètes qui sans se connaitre vont vivre un grand moment de leur saison. Pour la dixième année consécutive, villetri sur craule est support du championnat régional triathlon pour la région nouvelle brotanie-Val de France. L’évènement s’annonce festif et les meilleurs régionaux sont attendus.

Axel, 42 ans, 12 ans de triathlon va affronter Paul son rival de toujours. Cette année avec une préparation un peu spéciale et des ruses de vieux renard, il compte bien enfin briller.

Françoise : 47 ans, arbitre depuis 7 ans, se fixe pour objectif qu’un maximum de concurrent passe la ligne d’arrivée.

Justine et Coralie, 23 et 25 ans, bonnes coureuses, ont choisi Villetri pour sa natation avec courant et son parcours vélo roulant. La course idéale pour leur première participation.

Jérôme : 43 ans, 8 ans de pratique, la prépa exigeante de Paul son coach lui donne des ailes après cette semaine d’affutage. Il est chaud !

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Bateau organisation, 8h50 : Françoise ressort le thermomètre. La température affiche 19°. Elle transmet à l’arbitre principal par téléphone. Les concurrents seront autorisés à porter une combinaison néoprène. Elle est rassurée pour la sécurité des concurrents. Il y aura beaucoup de néophytes dans l’eau ce matin.

Chez Justine et Coralie, 8h :Les filles sont réveillées depuis une bonne heure. Le petit déjeuner est pris. Les VTT sont chargés, les sacs sont dans la voiture. Elles décident de se détendre un peu avant de prendre la route. Il n’y a qu’une demi-heure route jusqu’au site de la course. Ca va le faire. Elles ont peur mais elles ont hâte.

Aire de transition 9h08 : Françoise contrôle les dernières entrées dans le parc. Bouchons de cintres, dossards trois points, freins, casque avec jugulaire attachée et ajustée. Elle aperçoit au loin 2 jeunes filles qui se pressent pour rejoindre l’aire. Françoise devrait avoir fermé la zone depuis 8 minutes déjà, mais l’accoutrement des deux jeunes filles trahit la fraicheur d’un amateurisme qui fait plaisir à voir. Elle les attend, les contrôle et leur souhaite bonne course. Il est maintenant 10h03, la course bat son plein. Françoise contrôle une dernière fois la zone. Une couleur un peu flashy attire son attention. Une serviette d’un vert pétant est gentiment installée sur le cadre d’un beau cervello P5. Elle demande à l’organisation d’enlever le textile et poursuit son inspection.

Natation 10h19 :

Axel aperçoit la berge. Il lève la tête. Encore quelques mètres et il attaquera sa transition. Où est Paul ? Soudain il réalise sa perf, c’est Paul qui est là, juste devant lui. Excellente natation se dit-il !

Justine et Coralie ont entamé le retour de leur boucle. En brasse, elles échangent quelques mots d’encouragement et remettent la tête dans l’eau, elles gèrent leur effort pour la suite de la course.

Jérôme ne pense qu’à une chose : monter sur le vélo mais les mots du coach lui reviennent en tête : « en natation quand t’es dans le dur, tu t’appliques sur ta technique, tu iras aussi vite mais tu t’économiseras ». Jérôme allonge, soigne ses appuis et se parle « Allez mon Jéjé, t’es bien ».

Zone de transition 10h23 :

Axel entre dans la zone, cherche son petit « repère ». Mais rien. Il finit par retrouver son Cervello. Il jure intérieurement car il a aperçu Paul s’éloigner sur son CLM. Françoise est attentive aux sorties des premiers concurrents, elle agite son fanion signalant la ligne de montée sur le vélo. Au loin, elle aperçoit le propriétaire du fameux P5 qui n’a pas l’air très satisfait malgré sa bonne position.

Françoise continue d’agiter son fanion et contrôler les concurrents. L’aire se remplit puis se vide.

Jérôme est satisfait, il n’a pas perdu trop de temps dans l’eau, le meilleur arrive !

Justine et Coralie sont euphoriques, c’est dur mais quelles sensations ! Soudain quelqu’un les arrête. Mais qui c’est ce trouble fête ? Justine et Coralie mettent un peu de temps à comprendre que Françoise ne les laissera pas sortir sans que leur jugulaire de casque soit attachée. On se remet en conformité et on repart.

Circuit vélo 10h56 :

Justine et Coralie ont bien entamé leur circuit vélo. Elles papotent. Tout à coup une moto se porte à leur niveau. Françoise leur explique avec le sourire la règle de l’aspiration abri. Justine te Coralie confuses s’éloignent l’une de l’autre en pensant déjà à la partie pédestre.

Jérôme roule et roule bien même. Devant lui un autre cycliste se rapproche très lentement. Jérôme en bon gestionnaire, entreprend de le doubler mais sans se mettre dans le rouge. « Te grilles pas mon Jéjé, gardes en pour la CAP ». Tranquillement, il va gratter sa place. C’est alors qu’un coup de sifflet retentit. Un carton bleu sorti de nulle part le ramène à la réalité. « Et merde, pourtant je draftais pas ! »

Françoise, en moto, continue de remonter la file des vélos. Elle observe ce cysliste qui a l’air bien. Un petit coup d’oeil au compteur : 42, en effet il est en forme celui-ci. Devant lui un autre cycliste a aussi une bonne allure mais se fait remonter. Le dépassement va avoir lieu. Françoise, est expérimentée et anticipe l’infraction, elle commence à noter le numéro du dossard, l’heure, le kilomètrage sur son carton bleu. 20 secondes, 25 secondes, 30 secondes Françoise lui laisse un peu de marge. On est à 35 secondes quand elle lui signifie le carton bleu. Mais là, pas le temps de lui expliquer maintenant. Plus loin des cyclistes lui font des signes en agitant la main comme pour mimer un carton. En effet, quelques kilomètres en aval, elle fait à nouveau ralentir son pilote pour observer le manège d’un drafteur. D’après elle la roue du P5 est à 6 mètres, voire moins du CLM devant lui. Mais en s’approchant, elle jurerait que le cycliste a relâché son allure. et une fois à son niveau, elle ne peut que constater qu’il y a 10 mètres au moins entre les deux vélos. Encore ce vieux briscard se dit-elle ; pas de carton.

Axel a Paul en ligne de mire. Les watts sont très bons. Un peu élevés mais ça passe. Paul est n’est qu’à cinq mètres et il ne l’a pas vu ; très reposant. Axel attend son heure mais au loin il perçois le bruit d’un moteur. Il casse un rapport, relache l’effort tout en continuant de pédaler et laisse filer provisoirement Paul. Ça n’est pas passer loin se dit-il. Restons prudent, je finirais par l’avoir.

Aire de transition 11h20 : Françoise est positionnée à l’entrée de la zone de transition. La tête de course est là. Deux conccurrents se présentent et ça sent déjà le sprint. Le deuxième en cervello P5 maintient sa vitesse à l’approche de la zone. Intelligemment et prudemment son rival se laisse doubler pour garantir sa sécurité. Ouf, se dit-elle pas de casse, tout se passe bien. Elle continue son office. Se pointe alors avec le sourire à l’envers le cycliste qu’elle a cartonné un peu plus tôt. Il vient de terminer sa pénalité, son casque est attaché et ajusté. Nickel. Le flot des cyclistes continue d’arriver

Axel a suivi Paul et arrive en même temps que lui à l’approche de la zone de transition. Logiquement Paul ralentit à l’approche de la ligne. Axel tente. Il accélère et dans un mouvement plus que hasardeux il réussit tant bien que mal à poser un pied juste avant la ligne. Son deuxième pied touche le sol après la ligne mais bon, ça passe et il est devant Paul.

Jérôme s’approche de la partie pédestre. Avant la course, il avait bien écouté le brieffing et c’est tout naturellement qu’il se dirige avec son vélo vers l’espace dédié à sa pénalité. Seulement 2 minutes, c’est pas la mer à boire. Il prend son mal en patience et se remotive pour faire une CAP parfaite.

Coralie et Justine sont concentrées malgré la fatigue. Elles retrouvent l’arbitre qui les a coachées au début de la partie cycliste. Dans le respect le plus rigoureux possible des règles, elles entrent dans la zone de transition. Le départ pour la course à pied leur annonce le dessert. Les spectateurs sont là et effacent toute la fatigue accumulée. Très à l’aise en course à pied, elles décident de savourer le 10km. « Justine, on part pour moins d’une heure, OK pour toi ? », « Moins d’une heure, oui on est large. »

Ligne d’arrivée 12h : Axel est moins rapide que Paul en CAP, il le sait mais Paul n’est pas sprinteur, Axel le sait. Allez, ça se tente. Dans une accélération désepérée, Axel se rapproche. Le cardio indique 191, Mais il n’en a que faire. Logiquement, sans lucidité, il accroche une barrière qui arrache son dossard. Peu importe, la puce servira de témoin en cas de réclamation. Il donne tout sans pouvoir gratter cette place et franchit la ligne sans son dossard. 5ème au final. Axel ravale son amertume. Une arbitre s’avance vers lui.

Jérôme à une minute de retard sur son temps de course estimée. Mais ça fait toujours 3 minutes de mieux que son chrono de l’an passé. Le travail paye toujours se dit-il. Il franchit la ligne et aperçoit l’arbitre qui lui a mis un carton bleu. Remonté à bloc, il s’avance « J’ai deux mots à lui dire à celle-là »…

Justine et Coralie ont géré leur effort. Après 58 minutes de CAP, elle franchissent la ligne ensemble dans une ambiance de folie. Tout le quartier et les collègues sont venus pour les soutenir. Peu importe le classement, elles sont tout donné et cette liesse générale les galvanise. Les petits neveux surgissent pour finir avec elle. Que du bonheur.

Françoise est derrière la ligne d’arrivée. Les coureurs arrivent. Le premier sprint s’annonce. Bataille pour la quatrième place. Quel enjeu. Partant de très loin, elle reconnait le propritétaire du Cervello. Par contre, impossible de lire son dossard, il n’en a pas. Françoise s’avance vers lui pour lui expliquer que conformément à la règle, sans dossard il ne sera pas classé. Françoise lui laisse une chance de présenter le deuxième dossard que lui a fourni l’organisation tout en se disant qu’un maximum de coureur doit franchir la ligne… un maximum.

Quelques instants plus tard un coureur se présente à elle. Il n’a pas l’air très content et prétend avoir subit une pénalité selon lui injustifiée. Françoise se souvient très bien et lui explique que depuis cette année, les triathlètes ne disposent que de 25 secondes pour effectuer un dépassement. Frustré, il repart, jurant que ça lui servira de leçons pour l’an prochain. En plus, ça lui laisse encore une marge de progression.

Une clameur se fait entendre. Deux jeunes filles accompagnées de deux jeunes enfants s’avancent vers la ligne. Elle analyse cette arrivée collective. Cela n’a pas l’air de gêner l’organisation et quel avantage pourrait-elle tirer de cette « aide extérieure ». Selon elle aucun. Elle en conclue que le règlement est respecté. Les deux jeunes filles franchissent main dans la main le ligne d’arrivée sous les hourras du public. Pour Françoise l’objectif est atteint et cette joie collective lui apporte un supplément de satisfaction.

Épilogue : Ils nous ressemblent étrangement et c’est normal. Ces personnages, c’est vous, c’est nous. Vous savez désormais pourquoi certains prennent ou ne prennent pas de cartons bleu. Pourquoi on peut parfois passer la ligne avec ses enfants et d’autres fois non, pourquoi les arbitres sont nécessaires, utiles et humains.

Samedi 14 décembre, Karen, Bruno, Julien et moi-même avons suivi la formation d’arbitre régional. Nous serons avec Gregory Delaire vos interlocuteurs pour toute question de règlement.

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Fred editor